RÉFORME DE LA FILIÈRE SOCIALE
DE LA CATÉGORIE B
QUESTION SÉNAT – SÉANCE DU 11 OCTOBRE 2011 6571
GORIE B
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Boutant,
auteur de la question n° 1359, transmise à M. le ministre
auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités
territoriales et de l'immigration, chargé des collectivités
territoriales.
M. Michel Boutant. Madame la ministre, je souhaite appeler
votre attention sur les revendications exprimées par les assistants
socio-éducatifs et les éducateurs de jeunes enfants dans le
cadre de la réforme en cours de la filière sociale de la
catégorie B.
Des projets de décret ont ainsi prévu de nouvelles grilles
statutaires pour ces personnels. Cependant, il est regrettable
que les cadres d’emplois soient maintenus en catégorie B, alors
même qu’une intégration dans la catégorie A est réclamée
depuis plusieurs années.
Les représentants du personnel souhaiteraient une reconnaissance
du recrutement à bac+3 au lieu de bac+2
aujourd’hui. En effet, trois années de formation après le
baccalauréat sont nécessaires pour obtenir le diplôme d’État
qui permet de passer le concours externe d’assistant socioéducatif
ou d’éducateur de jeunes enfants.
Une reconnaissance de ces trois années d’études et une
intégration en catégorie A sembleraient donc tout à fait
logiques, et ce notamment dans la mesure où les infirmiers
hospitaliers sont justement intégrés dans la catégorie A au
terme de leurs trois ans de formation – il s’agit d’une durée
identique. De plus, la directive 2005/36/CE du Parlement
européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la
reconnaissance des qualifications professionnelles a classé les
diplômes de la filière sociale dans la catégorie A de la fonction
publique. Ajoutons que le processus de Bologne, qui a placé
les différents systèmes d’enseignement supérieur européens
dans un cadre commun, confère à ces diplômes le grade de
licence. Il semble donc urgent de faire cesser en France cette
discrimination multifactorielle.
Les personnels concernés ont un évident et légitime besoin
de reconnaissance. Une intégration dans la catégorie A
pourrait également leur permettre une réelle évolution
salariale, alors que les projets de décret actuels restent très
décevants à ce niveau. Ainsi, pour les assistants socio-éducatifs
et les éducateurs de jeunes enfants, sur le grade de base,
l’indice majoré est de 327 en début de grille et de 515 en
fin de grille, alors que, pour les infirmiers de la classe normale
de la fonction publique hospitalière, ces chiffres sont respectivement
de 335 et de 566. Une harmonisation paraît donc
nécessaire.
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Michel Boutant. Aussi, j’aimerais savoir si vous entendez
répondre favorablement aux demandes justifiées des personnels
de la filière sociale, qui souhaiteraient une intégration
dans la catégorie A et donc une reconnaissance de leur recrutement
actuel à bac+3.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de
l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de
l'immigration, chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur,
dans le cadre de la mise en oeuvre du nouvel espace statutaire
pour les fonctionnaires relevant de la catégorie B, les assistants
territoriaux socio-éducatifs et les éducateurs territoriaux de
jeunes enfants ont vocation à bénéficier d’une grille indiciaire
revalorisée. L’indice brut terminal serait porté de 638 à 675 et
le coût immédiat du reclassement des agents dans la nouvelle
grille devrait coûter à lui seul 32 millions d’euros. En outre,
une revalorisation du cadre d’emplois de catégorie A de cette
filière est envisagée parallèlement et se traduirait par la
création d’un grade d’avancement se terminant à l’indice
brut 780, soit un gain de 120 points par rapport à l’indice
terminal.
Des projets de texte en ce sens avaient effectivement été
inscrits à l’ordre du jour du Conseil supérieur de la fonction
publique territoriale du 16 mars 2011. Toutefois, les organisations
syndicales ont demandé à surseoir à l’examen de ces
textes, sollicitant notamment un avis des employeurs territoriaux.
Elles considèrent en effet que cette revalorisation est
insuffisante et que la réforme des formations correspondant
aux diplômes exigés pour l’accès aux cadres d’emplois doit
conduire à un basculement de catégorie. Elles invoquent à
cette fin le processus de Bologne – que vous avez évoqué –
d’ouverture à la libre circulation des professions sociales réglementées.
Il convient de préciser que la directive 2005/36/CE du
Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005,
adoptée dans le cadre du processus de Bologne, a d’ores et
déjà été transposée dans le droit français et n’a pas eu pour
objet de reconnaître le diplôme d’assistant de service social au
niveau licence.
À la suite du retrait des textes du Conseil supérieur de la
fonction publique territoriale, le ministère des collectivités
territoriales a sollicité l’avis formel de l’Association des
maires de France et de l’Assemblée des départements de
France afin de connaître leur appréciation sur l’opportunité
de faire passer le cadre d’emplois des assistants socio-éducatifs
en catégorie A.
Dans sa réponse, l’Association des maires de France – au
titre des communes, qui sont les principaux employeurs des
éducateurs territoriaux de jeunes enfants – considère que le
niveau de recrutement et les fonctions exercées justifient le
maintien du classement des éducateurs de jeunes enfants en
catégorie B.
Pour sa part, l’Assemblée des départements de France
indique que les projets de décret préparés par le Gouvernement
n’appellent pas en l’état d’observation particulière, mais
elle souhaiterait qu’une réflexion visant à examiner les moyens
de mieux reconnaître le travail accompli par les assistants
territoriaux socio-éducatifs et les éducateurs territoriaux de
jeunes enfants soit engagée avec toutes les associations concernées.
Le basculement en catégorie A des assistants territoriaux
socio-éducatifs et des éducateurs territoriaux de jeunes
enfants a donc été formellement écarté, même à moyen
terme, par les employeurs territoriaux.
Enfin, le coût très important pour les collectivités territoriales
d’un basculement en catégorie A de ces professions doit
être souligné : le simple reclassement des agents en catégorie A
coûterait 45 millions d’euros et pourrait entraîner des coûts
collatéraux difficilement supportables pour les finances départementales
si les grilles de ces professions exerçant dans le
secteur privé associatif – subventionné par les départements –
étaient parallèlement revalorisées. En effet, le coût du reclas-
sement est estimé à 90 millions d’euros en cas de maintien
d’un statut de non-cadre et à 200 millions d’euros en cas de
reclassement au niveau cadre.