#54: Liberté philosophique - Réflechissez par vous-même.

Réponse de l’auteur de la pétition à « Liberté philosophique » qui préfère ne pas signer de son nom.

Utiliser ce que nous offre gratuitement la nature pour
produire de l’électricité est en soit une idée bien séduisante. Ce n’est
cependant pas une raison pour le faire n’importe où et de manière anarchique.
En supposant que la technologie des éoliennes industrielles soit aboutie et
économiquement rentable (ce qui reste à prouver), il vaudrait mieux créer de
grands parcs de plusieurs centaines de machines dans des lieux dédiés, très
venteux et inhabités, plus faciles à raccorder au réseau, plutôt que de miter
tous nos paysages ruraux dont la variété et la beauté sont reconnues à travers
le monde.

A Grand-Rozoy, pour la plupart des habitants, cela a
commencé par la réunion publique du 8 décembre 2012, avec « pot de l’amitié »
offert par la Mairie et le promoteur Maïa Eolis. Les études présentées ce jour-là
montraient un projet déjà bien abouti, avec pas mal d’argent dépensé pour les
différentes études d’impact. Des questions se posent alors : est-ce Maïa
Eolis qui a démarché la commune, ou est-ce la commune qui est allé à la
recherche d’un promoteur éolien ? Depuis quand la mairie connait-elle le
projet ? Comment se fait-il que le promoteur dépense tant d’argent alors
que d’après le maire le projet n’a que 25% de chance de se faire ?

Revenons-en maintenant au sujet qui nous occupe, point par point :

Les nuisances sonores : depuis l’annonce du projet
(dans nos tracts etc …) nous incitons les citoyens à se rendre à Hautevesnes
pour se rendre compte par eux même et du bruit, et de la taille. C’est
d’ailleurs ce que nous avons fait, dès le lendemain de la réunion publique du 8
décembre, Maïa Eolis ayant précisé que les éoliennes de Grand-Rozoy seraient du
même modèle que celle de Hautevesnes. Jusqu’à 1 km, quand on double la distance
avec une éolienne on baisse le volume sonore de 3db. Si par ailleurs on double
le nombre d’éoliennes on l’augmente de 3 db. Prenons la donnée de 40 db pour
une éolienne à 300 m de distance.  Si on
l’éloigne à 600 m le bruit ne diminuera que de 3 db ce qui fera 37 db toujours
pour une machine. On passe à 2 éoliennes, à 600 m du point où l’on mesure le
bruit, cela fera 40 db. Pour 4 toujours à 600 m on aura un bruit de 43 db, pour
8 on aura 46 db. Si on éloigne maintenant nos 8 éoliennes à 1200 m ce qui sera
la situation approximative des habitants de Grand-Rozoy on reste à 43 db. Ce
qui par nuit calme ou après-midi de week-end reste tout à fait audible, à
comparer avec le bruit d’un jardin calme qui est évalué à environ 20 db. Dormir
la fenêtre ouverte équivaudra à dormir avec un lave-vaisselle en fonctionnement
permanent dans la chambre. D’ailleurs même le promoteur Maïa Eolis admet que
les éoliennes peuvent faire plus de bruit que la norme autorisée car il a
évoqué lors de la réunion la possibilité d’arrêter certaines machines en cas de
bruit trop important.

Des nuisances visuelles : nous n’avons jamais mis en
cause l’esthétique d’une éolienne qui reste une affaire de goût. Par contre on
ne peut pas nier que ces machines sont démesurées par rapport aux éléments du
paysage où l’on veut les installer : 120 m de haut à comparer à la taille
d’un très grand arbre (30 m) ou au clocher d’une église. Le photomontage du hameau
de Courdoux, visible dans une des annonces de la pétition, montre bien cette
démesure. De plus le projet prévoit de les positionner en 2 lignes sur la crête
au-dessus de Grand-Rozoy, ce qui provoquera encerclement et écrasement du
village.

Des conséquences mal évaluées sur la santé : des études
scientifiques montrent que les infrasons émis par les éoliennes, même si on ne
les entend pas, pourrait provoquer des symptômes chez certaines personnes. On
commence à étudier également d’autres symptômes regroupé sous le nom de « Syndrome
éolien », tel que des acouphènes, de la tachycardie … On pourra par
exemple lire avec profit le rapport suivant : http://asset.rue89.com/files/Eoliennes_et_sante_humaine-Nicole_Lachat.pdf.
La plupart des scientifiques ayant étudié le sujet s’accordent pour demander l’application
d’un principe de précaution consistant à placer les éoliennes industrielles à
une distance minimale de 1,5 à 2 km de toute habitation, en attendant d’avoir
réalisée des études plus poussées sur le sujet. L’Académie Française de
Médecine recommande elle-même la distance minimale de 1500 m.

Véritables épouvantails à touristes : iriez-vous passer
vos vacances dans une région où un village sur deux est entouré d’éoliennes
géantes ? Car c’est de cela que l’on parle, il ne faut pas s’arrêter à la
frontière de la commune de Grand-Rozoy. Que reste-t-il à la Picardie pour
développer son économie ? Le tourisme, un secteur économique qui crée un nouvel emploi tous
les 100000 euros de chiffre d’affaire. Notre
département est un de ceux qui possède le plus de monuments historiques, ses
paysages et ses lieux de mémoires racontant toute l’histoire de la France ne
sont situés qu’à 1h de Paris et de l’aéroport de Roissy, c’est un potentiel
encore inexploité qui pourrait attirer autant nos voisins d’Ile de France que
des touristes venus de l’autre côté de la planète. Encore faut-il ne pas
détruire ce potentiel.

La valeur des maisons diminuée de 20 à 50% : des jurisprudences
existent, nous avons consulté à nos frais un avocat pour avoir des références
réelles sur le sujet. Nous sommes disposés à partager les conclusions du rapport
de l’avocat si certains ont besoin d’être convaincus.

L’Angleterre et même le Danemark mettent un frein au
développement de leurs parcs éoliens : vous pouvez lire par exemple l'
article suivant : http://energie.lexpansion.com/energies-renouvelables/eolien-les-limites-du-modele-danois_a-33-6582.html. Nos décideurs pourraient analyser les retours d’expérience de pays qui ont
développé 15 ans avant nous l’éolien industriel pour en tirer les conséquences
dans tous les domaines plutôt que de copier une technologie bientôt obsolète
qui nécessite de faire tourner des centrales thermiques à charbon ou à gaz
lorsqu’il n’y a pas assez de vent c’est-à-dire 75% du temps (au Danemark, 48%
de l’électricité est produite par des centrales à charbon). Où est dans ce cas
l’aspect écologique des éoliennes ?

L’enrichissement des créateurs du projet : il est
évident que des sociétés telles que Maïa Eolis, filiale d’un groupe côté au CAC
40, cherchent à implanter le plus de parcs éoliens possibles pour enrichir leurs
propriétaires et actionnaires, c’est leur métier. Et cela au dépend du
contribuable (lire sur internet l'article "L'Etat va régler à EDF l'ardoise des énergies renouvelables")
et du consommateur d’électricité (voir site du Figaro, l'article "Électricité : la facture pourrait bondir de 30% d'ici à 2017"), sans qui l’exploitation de parc éolien ne serait pas rentable. C’est bien pour
cela qu’il faut faire preuve d’esprit critique en analysant les études d’impact
financées par le promoteur. Il faut aussi se renseigner sur leur façon de gérer
les problèmes et de respecter la réglementation sur les parcs existant :
Comment se fait-il que sur le parc de Remilly-Wirquin (article sur le site de La Voix du Nord) dans le Pas-de-Calais Maïa Eolis ait mis plus d’un an à résoudre le problème
de réception de la télévision entraîné par la mise en service du parc éolien ?
Comment se fait-il que le parc Maïa Eolis de Hautevesnes ne respecte pas la
réglementation pour la couleur des flashes qui doit être rouge la nuit ?

Quant aux agriculteurs qui toucheront de l’argent en louant
les terrains, il faut qu’ils sachent que le projet n’est pas totalement dénué
de risques : le démantèlement est certes prévu par le promoteur, mais qui
sait s’il existera encore dans 20 ans ? Pourquoi alors Maïa Eolis s’abrite-t-il
derrière une société écran « MSE les dunes » citée dans le document
disponible en mairie ? De plus la réglementation n’impose pas le démantèlement
total, le béton des fondations ne doit être enlevé que jusqu’à 1 m de
profondeur pour des terres agricoles. Il faut aussi savoir que dans certains
parcs éoliens existant les agriculteurs ont du mal à toucher leur loyer en
temps et en heure.

La mairie touchera certes une somme intéressante pour le
budget de la commune, mais il faut savoir que ces taxes sont calculées sur le
chiffre d’affaire du parc éolien. L’estimation du promoteur est basée sur 10
machines en fonctionnement avec du vent plus de 25% du temps. S’il y a moins de
vent que prévu dans l’année, si les tempêtes se font plus fréquentes (les
éoliennes de ce type doivent être arrêtée lorsque le vent dépasse 90 km/h), si
certaines machines sont en panne (ce que l’on constate souvent dès que l’on
passe près d’un parc éolien) ou arrêtées suite à des nuisances sonores trop
importante, la somme touchée par la commune se verra réduite
proportionnellement. Nous sommes allés à Hautevesnes, nous n’avons pas été frappés
par l’aménagement et l’embellissement du village, qui pourtant devrait être
facilité par l’argent des éoliennes (par exemple l’église a encore des vitraux
cassés)

Pour conclure, comme nous sommes ouverts au débat, même si le message de « Liberté
philosophique » est à la limite de l’insulte (on nous traite quand même de
menteurs, de manipulateurs et j’en passe) il ne sera bien sûr pas supprimé.

Régine et Pascal Nivart, Ingénieurs Civil des Mines